Lettre à Christian Eriksen

Cher Christian,
On ne se connait pas, bien sûr. Mais tu fais partie de ma vie.
Je t’ai observé en chair et en os sur scène deux fois. Pour deux parties de ma vie : à San Siro. La première, tu as même marqué contre l’Inter qui fêtait son retour en Ligue des Champions. Puis Vecino avait rendu la fin de soirée plus douce pour moi que pour toi. Mais, allez, tu t’étais vite consolé. Tu avais continué ton parcours avec tes Spurs jusqu’en finale. Avant de faire, quelques mois plus tard, le choix de l’Italie, de Milan et de l’Inter. Comment ne pas te comprendre ?
J’ai entendu et accompagné ce public nerazzurro scandant ton nom à ton entrée en jeu lors de la demi-finale aller de Coppa Italia contre le Napoli. C’était le 12 février, deux jours avant tes 28 ans. Quelques jours avant que nos vies changent.
C’était alors ta troisième apparition sous ton nouveau maillot après une présentation à la Scala, comme seul un artiste de ta classe le méritait.
Christian, tu es un joueur différent, qui nous émerveille sans en rajouter. Le geste avant la parole. Un esthète du jeu, un romantique du ballon rond, comme il en reste si peu. Tes douze derniers mois n’ont pas toujours été faciles sur le terrain. Mais tu t’es imposé par ton talent (ce coup franc contre Milan, deux semaines avant tes 29 ans) et tu as gagné un scudetto en protagoniste, marquant même le but du succès décisif.
Et hier, tu nous as confirmé être un homme attachant. Toi qui es né à la Saint-Valentin, tu n’as pas voulu nous briser le cœur et nous laisser comme ça. Tu n’as pas voulu abandonner ta famille, ton épouse, vos deux enfants, tes amis.
Christian, quand tu t’es écroulé, mon cœur s’est serré, ma tête s’est arrêtée, les larmes sont arrivées. Je suis sorti pour ne pas rester devant ces images. Ce malaise cardiaque m’a ramené quatre ans en arrière, pour un autre malaise, un autre type d’accident, fatal celui-ci. Et je ne pouvais pas m’empêcher de penser aux tiens, qui ont besoin de toi. Tes partenaires ont été incroyables pour te protéger du voyeurisme. Ils ont été à ta hauteur, surtout Simon Kjaer. Et toutes les pensées ayant suivi, de tes amis, (ex) coéquipiers, adversaires, inconnus, ont juste illustré qu’on a tous besoin de toi.
Cette scène avec ton premier fils sur tes épaules, ce grand sourire, le jour de la remise du trophée à San Siro, je veux la revoir. On veut tous la revoir. Car tu fais partie d’une famille aux liens invisibles, mais forts. Une famille qui a prié pour toi, en dépit des religions, des croyances ou non ou encore des équipes et nations de cœur.
“L’essentiel est invisible pour les yeux” selon un petit prince. Toi, Prince du football, tu nous as ouvert les yeux pour nous rappeler que l’essentiel peut être remis en cause en quelques secondes. Que tout peut s’écrouler. Que tout peut se relever. Non, ta fin ne pouvait pas être tragique comme celle d’un autre prince danois – interprété à la Scala et ailleurs : Hamlet.
Christian, ce matin, tu es en vie et je ne peux imaginer le soulagement, la joie de tes proches.
Je t’attends à San Siro très vite. Jamais deux sans trois, ce n’est pas juste un dicton, mais une règle de vie.
Bon rétablissement, Fratello del mondo.

Cédric

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